Le complot en France aurait-il un regain d’énergie ces dernières années ? C’est ce que laisse penser une enquête publiée par l’Ifop le 12 janvier dernier, interrogeant les 11-24 ans sur leur vision des éléments historiques et scientifiques. Si les chiffres sont alarmants, l’étude reste à prendre avec des pincettes.
Plus de 16 % des 11-24 ans sont « platistes ». Publiée le 12 janvier dernier par l’Ifop, cette nouvelle enquête autour du complot chez les jeunes en France lance un coup de froid alarmant. Avec l’arrivée des nouvelles technologies et de la possibilité de s’informer sur quasiment n’importe quel support (réseaux sociaux, télévision, radio, internet), le complotisme semblait loin derrière nous. Et pourtant, d’après cette nouvelle étude commandée par les fondations Jean-Jaurès et Reboot auprès de l’Ifop, ce serait tout l’inverse.
Le complot en France, un caractère alarmant ?
Cette étude a ciblé les jeunes entre 11 et 24 ans afin de visualiser l’évolution du complotisme. Les résultats sont ahurissants avec des pourcentages de réponses qui ne régressent pas depuis les dernières études à ce sujet. Seules deux réponses étaient possibles : « D’accord » ou « Pas d’accord ». Premier chiffre assez choquant, 27 % des sondés sont d’accord sur le fait de remettre en question la théorie de l’évolution. Derrière ce chiffre, les répondants s’opposent à la science qui affirme que l’Homme descend du singe. Pour eux, les êtres humains seraient nés d’une « force spirituelle ».
On continue dans le complot avec un chiffre sur les pyramides égyptiennes. Selon ce sondage, 19 % des sondés pensent que les pyramides égyptiennes ont été bâties par des forces extraterrestres. Ils jugent que les moyens de l’époque trop rudimentaires pour une telle précision et une telle charge de travail.
D’autres chiffres vont dans ce sens : 20 % des jeunes interrogés pensent que les Américains ne sont jamais allés sur la Lune, 16 % sont convaincus que la Terre est plate, et 26 % remettent en cause la véracité du massacre de Boutcha en Ukraine.
Une remise en question de la science
Cette étude a notamment permis de mettre en lumière une remise en question de la science, de plus en plus importante. En effet, les sciences et médecines alternatives prennent du terrain au profit de la science universelle. Par exemple, 49 %, soit près de la moitié des personnes sondées, considèrent le signe du Zodiaque comme une science, contre 43 % en 1999. Il y a une augmentation de 6 points de pourcentage, ce qui reste conséquent en l’espace de 23 ans.
En dehors de ce chiffre, l’astrologie et la magie en général mettent en difficulté la science traditionnelle qui guide nos sociétés depuis plusieurs siècles. Par exemple, parmi les personnes sondées, 48 % croient aux esprits, 44 % au paranormal et 35 % à la réincarnation.

Finalement, selon cette étude, le complotisme progresse au fil du temps. Si en 1972, 55 % des 18-24 ans pensaient plus de bien que de mal des vérités scientifiques, aujourd’hui, nous avons perdu près de 22 points de pourcentage. En 2022, 33 % des jeunes en pensent plus de bien que de mal.
La part des jeunes qui pensent autant de bien que de mal des vérités scientifiques a également progressé. 38 % en 1972 contre 41 % en 2022. La part des jeunes qui en pensent plus de mal que de bien est quant à elle passée de 6 % en 1972 à 17 % en 2022. Ces chiffres témoignent de la situation qui se dégrade chez la jeunesse, mais pourquoi ?
Les réseaux sociaux, centre de formation des complotistes ?
Après des chiffres aussi alarmants, il est important voire nécessaire de comprendre d’où vient ce phénomène. Quand on s’intéresse aux profils des sondés ayant une vision plutôt complotiste de la société, on se rend compte que les réseaux sociaux y jouent un rôle important.
On remarque en effet que ces jeunes s’éloignent des plus en plus des médias traditionnels comme les journaux papiers, télévisés ou radiophoniques et s’informent de plus en plus via les réseaux sociaux. Le problème ne réside pas dans les réseaux sociaux en eux-mêmes, mais plutôt en les contenus consultés via ces derniers. Sur les personnes sondées ayant eu des réponses assez surprenantes, la plupart d’entre eux considèrent TikTok comme un moteur de recherche.
Pire encore, 41 % d’entre eux considèrent la crédibilité d’un utilisateur en fonction de son nombre d’abonnés et de vues. Par exemple, 30 % pensent que les vaccins contre la Covid-19 contiennent des puces 5G ou encore des éléments toxiques qui causent des dommages irréversibles.
Les réseaux sociaux jouent un rôle majeur dans cette conversion de la jeunesse vers le complotisme avec énormément de « fake news », disponibles en quelques clics, et ce encore plus depuis le début de la pandémie de Covid-19.

Une étude qui mérite une remise en question
Bien qu’alarmante, cette étude est à prendre avec des pincettes. En effet, avec du recul, les techniques employées dans cette étude laissent à désirer. Premièrement, le nombre de personnes sondées est dérisoire, avec seulement 2 003 jeunes interrogés dont seulement 942 jeunes entre 18 et 24 ans. De plus, entre 11 ans et 24 ans, les mentalités changent et les opinions personnels se forgent, ce qui enlève de l’intérêt envers ce sondage qui stigmatise une jeunesse en construction.
Finalement, le complot en France reste alarmant et actif dans notre société. Il est important de lutter contre les « fake news » et le conspirationnisme comme nous le montre cette étude, qui reste largement critiquable.